Le SARCOPHYTON sp. ou corail cuir par Michel Fraiture

 

Texte et photos de Michel Fraiture

 

 

CLASSE des ANTHOZOAIRES - SOUS-CLASSE des OCTOCORALLIAIRES
NOM DE FAMILLE : Alcyoniidae
GENRE : Sarcophyton (Lesson 1934)
ESPECE : sp.
NOM COMMUN : Leather coral (Anglais) , Corail cuir (Français)

 

 

Classification

 


Sarcophyton est un corail mou. Il fait donc partie de la sous-classe des octocoralliaires, c'est-à-dire des coraux qui possèdent à l’extrémité de leurs polypes 8 tentacules entourant un orifice, le pharynx, lui-même prolongé par la cavité gastrique. Les polypes se rétractent à la moindre variation des conditions du milieu ainsi qu’au simple effleurement.
Notre corail se classe ensuite comme ceci : (d’après Bayer, 1981)
       sous classe des Octocoralliaires
             ordre des Alcyonacea
                  sous-ordre des Alcyoniina ou Alcyonaires
                       famille des Alcyoniidae
                           genre Sarcophyton.
Dans la famille des Alcyoniidae, sont repris une bonne vingtaine de genres, dont certains s’appellent aussi Corail cuir mais ne sont pas pour autant des Sarcophytons :
         - Lobophytum : finger leather, avec des lobes bien marqués sur le capitule
         - Sarcophyton : leather coral, avec des plis bien marqués du capitule
         - Sinularia : finger leather, avec des doigts bien marqués, parfois longs comme de petites branches qui poussent le capitule vers le haut ; très voisin du Lobophytum
Vous voyez qu’on ne peut pas non plus se fier aux noms anglais pour ces classifications.

 

 

Distribution

 


Mer Rouge, Océans Indo-Pacifique.
En fait, c’est un corail courant, commun aux eaux chaudes et aux champs coralliens de peu de profondeur. Sa grande répartition géographique se justifie par la facilité d’adaptation de ce type de corail à la cohabitation avec la plupart des coraux, poissons … et autres invertébrés, en général.

 

On en trouve aussi au pied des pentes abruptes, dans la zone occupée par des éboulis

 

 

 

 


Habitat

 


Sa place privilégiée se trouve sur des tombants de la pente récifale supérieure. Ces pentes possèdent des corniches qui permettent à des boutures de Sarcophyton de s’accrocher au substrat et se développer ainsi dans les meilleures conditions. On en trouve aussi au pied des pentes abruptes, dans la zone occupée par des éboulis, juste avant les zones sablonneuses, à condition que ces endroits ne soient pas à trop grande profondeur car notre corail a besoin d’un maximum de lumière.
En effet, il se nourrit à partir de zooxanthelles, cellules végétales incorporées dans ses tissus qui fabriquent la matière organique grâce à la lumière qu’elles absorbent, par le principe de la photosynthèse.
On retrouve parfois notre Sarcophyton dans la zones des vagues qui déferlent sur les récifs au niveau zéro des fortes marées basses. Le pied est très bien ancré dans la roche calcaire et l’animal résiste ainsi à des va et vient du flux et reflux occasionnels. Ce qui signifie qu’il ne faut pas avoir peur d’inverser les courants dans l’aquarium et malmener notre corail pendant un court laps de temps.

 

 

Description

 


Sarcophyton a la forme d’un gros champignon au pied solide, très charnu et bien ancré dans la roche qui lui sert de support. Son « chapeau » appelé dans ce cas-ci un capitule, a lui aussi un aspect charnu, ses bords relativement épais se plissent, ondulent très très lentement, les mouvements sont à peine perceptibles. L’ensemble est de couleur brun pâle, parfois jaune ou vert.

 

 

 

Capitule du Sarcophyton Ce dernier est accroché à un décor en pente, à mi-hauteur dans l’aquarium. Le pied est bien musclé lorsque l'animal est en bonne forme.

 

 

 

Mais on ne peut comparer le Sarcophyton à un champignon. Déjà parce que le champignon est un végétal et non un animal sessile mais aussi parce que le corps du champignon n’est que l’appareil reproducteur de celui-ci. Par contre, le Sarcophyton est un animal complet en lui-même, ses échanges avec le milieu extérieur peuvent se faire par l’intermédiaire des zooxanthelles comme il a été dit plus haut, mais aussi par une multitude de polypes plus ou moins grands qui ornent le capitule.
Selon l’espèce de Sarcophyton et selon la région où il se développe, les polypes peuvent être longs ou courts, peu nombreux ou densément implantés sur le capitule. Ils seront blancs, jaunes, verts, très rarement bleus. La bouche de chaque polype est entourée de huit petits bras à peine visibles à l’œil nu dans la plupart des cas. Cette bouche ou pharynx capte des aliments microscopiques qui seront envoyée et digérés dans une cavité gastrique.

 

 

 

Photo macro - on peut deviner, par endroits (côté droit) et par transparence, les cavités gastriques à l’intérieur des polypes.

 

 

Des tubes endodermiques capteront la nourriture pour la répartir dans le coenenchyme, la chair propre de l’animal. Le pied est parcouru de nombreux vaisseaux conducteurs qui font penser à la circulation de la sève dans les branches d’un arbre. Mais attention, cette seconde manière de se nourrir n’est qu’un complément à la nourriture principale qui provient des zooxanthelles, comme cela a été expliqué plus haut.

 

 

Acclimatation et maintenance

 


Sarcophyton n’est pas un corail exigeant. Il peut être conseillé aux débutants en aquariophilie récifale.
Il est d’ailleurs particulièrement indiqué vu sa sensibilité démonstrative mais vite pardonnée.
L’aquarium ne sera pas trop exigu, l’animal n’est pas tout petit et il se développe rapidement si les conditions du milieu lui plaisent ; 200 litres est un minimum.

 

Placer une pompe de brassage suffisante au ras de l’eau, avec possibilité de variation de direction occasionnelle. Le mouvement d’eau est important, s’il n’est pas suffisant, les polypes restent rétractés, et s’il est trop fort, ils restent rétractés aussi. Il faut donc trouver le juste débit.

 

 

 

Sarcophyton avec polypes rétractés, après un ajout d'eau de chaux

 

 

 

En fait, Sarcophyton est un animal solide mais il montre rapidement son mécontentement et sa sensibilité en se refermant sur lui-même. Heureusement, il se remet en quelques jours de la plupart des problèmes.
Lorsque vous compensez l’eau d’évaporation par de l’eau osmosée, par exemple, vous devez faire un ajout d’hydroxyde de calcium à petites doses, en utilisant le goutte à goutte et en laissant s’écouler la moitié de ce qui est prévu par la notice explicative de votre produit, pour un temps déterminé. Surveillez bien votre PH, il ne doit pas sortir de la fourchette 8 – 8,5. Procédez aux ajouts le soir, de préférence.
En ce qui concerne les changements d’eau, allez-y par petits coups, 20 à 30 litres par semaine maximum, selon la capacité du bac. Préparez votre eau 24h à l’avance.
Sarcophyton est même sensible au moindre changement de densité. Il a tendance à préférer, d’après mon expérience, 1022 – 1023 plutôt que 1024 – 1025.

 

 

 

 

L'animal se rétracte tellement qu'il apparaît comme des pores à la place des polypes.

 

 

C'est aussi un moyen pratique pour chasser les impuretés qui se sont déposées sur son corps

 

 

 

Attention aussi aux ajouts d’iode, allez-y très doucement, par petits essais, il n’a pas l’air d’apprécier tellement les oligo-éléments que l’on introduit séparément, et surtout ne dépassez pas les quantités suggérées par le fabricant.
L’éclairage doit être puissant, un HQI n’est pas indispensables mais il est conseillé. Le corail a sa place à mi-hauteur dans l’aquarium, sur un replat mais de préférence dans la zone influencée directement par l’HQI. Il ne faut pas oublier que sa nourriture provient de petits organismes chlorophylliens, principalement, les zooxanthelles.
Il ne faut pas nourrir Sarcophyton, pour les motifs cités ci-dessus. Certains écrits signalent cependant que ce corail grandit plus vite si on l’entoure de temps en temps d’un petit nuage de nauplies d’artémia salina.

 

 

 

Les polypes s'ouvrent complètement si les paramètres de l'eau ne sont pas modifiés depuis plusieurs jours. Allez-y donc avec délicatesse pour faire vos changements d'eau.

 

 

Reproduction

 

Reproduction par bourgeonnement :
C’est la reproduction asexuée. A la base du pied apparaît
une petite boursouflure qui enfle de plus en plus pour
enfin donner l’apparence d’un animal fille qui se détachera
par après de sa mère. Mais comme les déplacements
de ce corail sont presque nuls, on peut voir, dans la nature,
plusieurs Sarcophytons restés collés l’un à l’autre.

 

Reproduction par fragmentation :
La scissiparité :
C’est une autre forme de reproduction asexuée,
la plus courante chez la plupart des animaux sessiles.
Un étranglement apparaît à un certain niveau du corps,
cet endroit semble se resserrer de plus en plus pour
finalement séparer l’animal en deux. La fragmentation
se fait généralement dans le sens longitudinal, mais pas
obligatoirement. Chez Sarcophyton, des zones de nécrose
peuvent apparaître sur le capitule et des lambeaux de celui-ci
peuvent se détacher pour reformer un animal complet un peu plus loin.

 

La lacération du pied :
En se déplaçant, ce corail peut abandonner un morceau
de son pied qui sera suffisant pour reconstituer un animal entier.

 

La fragmentation provoquée :
L’homme peut intervenir et fragmenter lui-même
le capitule d’un Sarcophyton au moyen de ciseaux.
Cela peut se faire en aquarium, il faut fixer
chaque morceau à une roche calcaire au moyen
d’un élastique. Les tissus se renourriront
d’eux-mêmes.

 


Reproduction sexuée :
Cette reproduction se fait en eau libre chez Sarcophyton, ce qui n’est pas le cas pour tous les octocoralliaires. Les gamètes mâles ou femelles sont logés dans des petits sacs à l’intérieur de la cavité gastrique. Les ovules et spermatozoïdes sont libérés en pleine eau, et c’est là que la fécondation a lieu. Elle donne lieu à la formation d’une larve intermédiaire, la planula, qui se fixe
quelques jours plus tard au substrat. Des zooxanthelles s’implantent dans la planula dans la quinzaine de jours qui suivent.
Je crois qu’il n’est pas nécessaire de vous dire que cette reproduction n’a jamais été observée en aquarium.

 

Les agressions extérieures

Sarcophyton est très résistant aux maladies, même s’il semble être sensible aux variations des conditions du milieu.
Ce sont les agressions extérieures qui peuvent altérer son comportement et parfois mettre sa vie en danger, principalement par des invertébrés microscopiques ou non.

 

Une bactérie peut s’attaquer au capitule du corail et s’en nourrir. On aperçoit le problème si une zone bien définie s’éclaircit, blanchit ou jaunit et que cette tache persiste plusieurs jours.
Généralement, le corail réagit de lui-même (voir chapitre suivant) et se débarasse naturellement de ce problème.

Les planaires : ce sont des vers plats gris bruns, de 2 ou 3mm de diamètre qui peuvent s’attaquer aux coraux et leur causer préjudice. On les détecte à l’œil nu . Il suffit de plonger le corail dans l’eau douce pendant quelques secondes pour les éliminer.

 

Les escargots : ils aiment s’attaquer aux coraux cuir, principalement le genre Coralliophila, qui perce le pied du corail pour y pénétrer et s’en nourrir.
Certaines porcelaines se nourrissent exclusivement de coraux mous. Se renseigner, donc, avant d’acheter, ex. Ovula ovum, attaquent principalement Xenia et Sarcophyton.

 

Les limaces de mer : les Aeolidacea, du sous-ordre des nudibranches, se nourrissent aussi de coraux mous, à éviter en aquarium, de même que les Dendronotacea. Sinularia et Sarcophyton sont des proies privilégiées.

 


Les moyens de défense du Sarcophyton

Le film cireux
Notre corail a la capacité de s’entourer d’une pellicule cireuse, du mucus, qui s’épaissit lorsque l’animal reste rétracté pendant plusieurs jours. Puis, en une fois ou par grands lambeaux, il s’en débarrasse, ce qui entraîne en même temps l’élimination de déchets, d’algues, bactéries et autres parasites. Cela fait un peu penser à la mue chez les reptiles

 

 

 

 

Sarcophyton rétracté.
Il mérite bien son nom de corail cuir sous cette forme.
La surface est lisse, rose, parsemée de quelques veines non colorées, blanchâtres. On peut aussi observer l’aspect charnu du capitule.

 

 

On peut observer trois morceaux du voile de mucus qui commencent à se détacher.

 

 

 

Emission de substances toxiques
Sarcophyton peut émettre des substances toxiques dans l’eau et indisposer son voisinage.
Ces substances s’appellent sarcophines, terpénoïdes, diterpénoïdes…
Elles servent à tuer les microbes, bactéries et autres parasites qui s’aventurent à proximité du corail.
Mais elles ont aussi pour but d’éloigner les autres coraux, les empêcher de se développer en contrariant leur croissance et même en les tuant. Des écrits citent l’action mortelle d’un corail sur un autre jusqu’à 30 cm de distance. Je n’ai personnellement jamais eu de problème de voisinage avec mon Sarcophyton, mais il paraît que cela dépend des espèces coralliennes qu’il côtoie.
Il faut aussi signaler que la pellicule cireuse, que le corail libère parfois, contient des substances toxiques qui peuvent entraîner des nécroses si elle va se poser sur un autre corail.
La lutte pour l’espace vital est un phénomène naturel et toujours présent en aquariophilie marine.
Il existe aussi dans le milieu fermé de l’aquarium et ses conséquences peuvent être plus graves quand on se rend compte que l’eau n’est renouvelée que lors des opérations de maintenance.
Mais le sujet est encore très mal connu du grand public.

 

 

 

Ici, 2 morceaux de voile. Remarquez, en même temps, la réapparition progressive des polypes.

 

 

 

Un dernier conseil, n’achetez pas un spécimen si vous voyez que le pied cède sous le poids du capitule, celui-ci s’inclinant vers le bas jusqu’à toucher la roche. Veillez à ce que le pied soit fixé à un support, même petit.

 

                                                                                                              Michel Fraiture

 

 

 


Bibliographie

 


L’aquarium marin Revue Aqua Plaisir hors série n°3 1999.
Guide du récif Corallien, la Mer Rouge par Helmut Debelius Ed. PLB
L’aquarium récifal, tomes I et II de J. Charles Delbeek et Julian Sprung
Marine Invertebrates par Martyn Haywood et Sue Wells. Ed. Salamander book
L’aquarium optimal, par Horst Kipper. Ed. Aquadocumenta Sarl
La Mer Rouge par Andrea Ghisotti. Ed. Bonechi
Biologie - par Arms et Camp tome I - Editions Universitaires

 

 

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